Directive du 11 avril 2024 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal

La Directive (UE) 2024/1203 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal et remplaçant les directives 2008/99/CE et 2009/123/CE a été publiée au JOUE (JOUE du 30 avril 2024). Elle est entrée en vigueur le 21 mai 2024.

Elle établit des règles minimales de définition d’infractions pénales et de sanctions visant à protéger l’environnement de manière efficace (notamment pour lutter contre la déforestation, les captages d’eaux illégaux ou la commercialisation de certains produits illicites et dangereux). Elle définit les mesures visant à prévenir et à combattre la criminalité environnementale et à faire appliquer efficacement le droit environnemental de l’Union.

Cette Directive devra avoir été transposée en droit français au plus tard le 21 mai 2026, ce qui pourrait bien être un vaste chantier, truffé de quelques nids à contentieux.

Les Etats membres devront par ailleurs avoir établi et publié une stratégie nationale de lutte contre les infractions pénales environnementales au plus tard le 21 mai 2027.

Liste de comportements constitutifs d’une infraction pénale

La Directive (UE) 2024/1203 du 11 avril 2024 impose aux États membres de veiller à ce que les comportements, précisément définis à l’article 3 paragraphe 2, constituent une infraction pénale lorsqu’ils sont illicites et intentionnels voire, pour certains d’entre eux, lorsqu’ils sont adoptés par négligence grave.

Cette liste impose de réprimer les comportements suivants :

a) le rejet, l’émission ou l’introduction d’une quantité de matières ou de substances, d’énergie ou de radiations ionisantes, dans l’air, le sol ou l’eau, causant ou susceptibles de causer la mort de personnes ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore ;

b) la mise sur le marché, en violation d’une interdiction ou d’une autre exigence visant à protéger l’environnement, d’un produit, dont l’utilisation à plus grande échelle entraîne le rejet, l’émission ou l’introduction d’une quantité de matières ou de substances, d’énergie ou de radiations ionisantes dans l’air, le sol ou l’eau, et cause ou est susceptible de causer la mort de personnes ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore ;

c) sous certaines conditions, la fabrication, la mise sur le marché ou la mise à disposition sur le marché, l’exportation ou l’utilisation de substances, qu’elles se présentent isolément ou dans des mélanges ou des articles, y compris leur incorporation dans des articles, lorsque de tels comportements causent ou sont susceptibles de causer la mort de personnes ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore ;

d) la fabrication, l’utilisation, le stockage, l’importation ou l’exportation de mercure, de composés du mercure, de mélanges de mercure et de produits contenant du mercure ajouté, lorsque de tels comportements ne sont pas conformes aux exigences énoncées dans le règlement (UE) 2017/852 du Parlement européen et du Conseil, et causent ou sont susceptibles de causer la mort de personnes ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore ;

e) la réalisation de projets au sens de l’article 1er, paragraphe 2, point a), et tels qu’ils sont visés à l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil, lorsqu’un tel comportement est adopté sans autorisation et qu’il cause ou est susceptible de causer des dommages substantiels à la qualité de l’air ou du sol ou à la qualité ou à l’état des eaux, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore;

f) sous certaines conditions, la collecte, le transport ou le traitement de déchets, la surveillance de ces opérations ainsi que l’entretien subséquent des sites de décharge, notamment les actions menées en tant que négociant ou courtier ;

g) le transfert de déchets, au sens de l’article 2, point 26), du règlement (UE) 2024/1157 du Parlement européen et du Conseil, lorsqu’un tel comportement concerne une quantité non négligeable, qu’il ait lieu en un seul transfert ou en plusieurs transferts qui apparaissent liés;

h) le recyclage des navires relevant du champ d’application du règlement (UE) n° 1257/2013, lorsqu’un tel comportement n’est pas conforme aux exigences visées à l’article 6, paragraphe 2, point a), dudit règlement ;

i) les rejets par les navires de substances polluantes relevant du champ d’application de l’article 3 de la directive 2005/35/CE dans les zones visées à l’article 3, paragraphe 1, de cette directive, sauf si ces rejets par les navires remplissent les conditions applicables aux exceptions prévues à l’article 5 de cette directive, qui causent ou sont susceptibles de causer une détérioration de la qualité de l’eau ou des dommages au milieu marin ;

j) l’exploitation ou la fermeture d’une installation dans laquelle une activité dangereuse est exercée ou dans laquelle des substances dangereuses ou des mélanges dangereux sont stockés ou utilisés, lorsque de tels comportements et une telle activité dangereuse (cf. directive 2012/18/UE du Parlement européen et du Conseil ou ddirective 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil), et que de tels comportements causent ou sont susceptibles de causer la mort de personnes ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore ;

k) la construction, l’exploitation et le démantèlement d’une installation, lorsque de tels comportements et une telle installation relèvent du champ d’application de la directive 2013/30/UE du Parlement européen et du Conseil (29) et que de tels comportements causent ou sont susceptibles de causer la mort de personnes ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore ;

l) sous certaines conditions, la fabrication, la production, le traitement, la manipulation, l’utilisation, la détention, le stockage, le transport, l’importation, l’exportation ou l’élimination de matières radioactives ou de substances radioactives, lorsque de tels comportements et de telles matières ou substances relèvent du champ d’application des directives Euratom, et que de tels comportements causent ou sont susceptibles de causer la mort de personnes ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ou des dommages substantiels à un écosystème, à la faune ou à la flore ;

m) le captage d’eaux de surface ou d’eaux souterraines au sens de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil, lorsqu’un tel comportement cause ou est susceptible de causer des dommages substantiels à l’état écologique ou au potentiel écologique des masses d’eau de surface ou à l’état quantitatif des masses d’eau souterraines ;

n) la mise à mort, la destruction, la capture, la détention, la vente ou la mise en vente d’un ou de plusieurs spécimens d’une espèce de faune ou de flore sauvages inscrite à l’annexe IV, ou à l’annexe V lorsque les espèces figurant dans cette annexe sont soumises aux mêmes mesures que celles adoptées pour les espèces figurant dans l’annexe IV, de la directive 92/43/CEE du Conseil (34) et d’un ou de plusieurs spécimens des espèces visées à l’article 1er de la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil, sauf lorsque de tels comportements concernent une quantité négligeable de ces spécimens ;

o) le commerce d’un spécimen ou de plusieurs spécimens, ou de parties ou produits obtenus à partir de ces spécimens, d’une espèce de faune ou de flore sauvages inscrits aux annexes A et B du règlement (CE) no 338/97 du Conseil, et l’importation d’un ou de plusieurs spécimens de cette espèce, ou de parties ou produits obtenus à partir de ces spécimens, inscrits à l’annexe C dudit règlement, sauf dans les cas où de tels comportements concernent une quantité négligeable de ces spécimens ;

p) la mise sur le marché de l’Union, la mise à disposition sur le marché de l’Union ou l’exportation à partir du marché de l’Union de produits de base en cause ou de produits en cause, en violation de l’interdiction prévue à l’article 3 du règlement (UE) 2023/1115, sauf dans les cas où de tels comportements concernent une quantité négligeable ;

q) tout comportement causant la détérioration d’un habitat au sein d’un site protégé, ou la perturbation d’espèces animales énumérées à l’annexe II, point a), de la directive 92/43/CEE au sein d’un site protégé, au sens de l’article 6, paragraphe 2, de ladite directive, lorsque cette détérioration ou perturbation est significative ;

r) sous certaines conditions, l’introduction sur le territoire de l’Union, la mise sur le marché, la conservation, l’élevage ou la culture, le transport, l’utilisation, l’échange, la mise en situation de se reproduire, de pousser ou d’être cultivées, la libération dans l’environnement ou la propagation d’espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union ;

s) la production, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation, l’utilisation, ou le rejet de substances qui appauvrissent la couche d’ozone, qu’elles se présentent isolément ou dans des mélanges, telles qu’elles sont visées à l’article 2, point a), du règlement (UE) 2024/590 du Parlement européen et du Conseil, ou la production, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation ou l’utilisation de produits et d’équipements, ainsi que de parties de ceux-ci, contenant des substances qui appauvrissent la couche d’ozone ou dont le fonctionnement est tributaire de ces substances, tels qu’ils sont visés à l’article 2, point b), dudit règlement ;

t) la production, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation, l’utilisation, ou le rejet de gaz à effet de serre fluorés, qu’ils se présentent isolément ou dans des mélanges, tels qu’ils sont visés à l’article 2, point a), du règlement (UE) 2024/573 du Parlement européen et du Conseil ou la production, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation ou l’utilisation de produits et d’équipements, ainsi que de parties de ceux-ci, contenant des gaz à effet de serre fluorés ou dont le fonctionnement est tributaire de ces gaz, tels qu’ils sont visés à l’article 2, point b), dudit règlement, ou la mise en service de ces produits et équipements.

Echelle des peines

Les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour garantir que les infractions pénales visées par la Directive sont passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives.

La Directive définit une échelle et une typologie de sanctions, selon les infractions, les circonstances et la personne mises en cause, en ses articles 5 à 10.

Infractions pénales qualifiées et sanctions plus sévères

Les infractions pénales précitées peuvent conduire à des résultats catastrophiques, tels qu’une pollution généralisée, des accidents industriels ayant des effets graves sur l’environnement ou des incendies de forêt de grande ampleur.

Lorsque de telles infractions causent la destruction d’un écosystème d’une taille considérable ou d’une valeur environnementale considérable ou d’un habitat au sein d’un site protégé, ou causent des dommages étendus et substantiels qui sont soit irréversibles soit durables à un tel écosystème ou habitat, ou causent des dommages étendus et substantiels qui sont soit irréversibles soit durables à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau, ces infractions, qui conduisent à de tels résultats catastrophiques, elles constituent des infractions pénales qualifiées.

Ces infractions pénales qualifiées sont passibles de sanctions plus sévères que celles applicables dans le cas d’autres infractions pénales définies dans la présente directive. Elles peuvent englober un comportement comparable à un «écocide», qui est déjà couvert par le droit de certains États membres et fait l’objet de discussions dans les enceintes internationales.

Protection des personnes qui signalent une infraction

La directive impose les États membres prennent les mesures nécessaires pour que toute personne qui signale des infractions pénales visées aux articles 3 et 4 de la présente directive, en fournissant des éléments de preuve ou en coopérant d’une autre manière avec les autorités compétentes, ait accès à des mesures de soutien et d’assistance dans le cadre des procédures pénales, conformément au droit national.

=> Accéder au texte intégral de la directive (UE) 2024/1203 du 11 avril 2024, ici